Ce samedi 1er mars marquera le deuxième anniversaire de l’entrée en vigueur du règlement de compensation (1) voté par la Communauté d’Agglomération Pays Basque. L’association de défense des locataires Alda, qui en tire un bilan positif et encourageant, appelle à objectiver les effets de cette mesure, et met en garde contre le travail de sape à visée électorale qui nuit au droit de vivre et se loger au Pays. 

Hémorragie stoppée net

Premier effet incontestable du règlement de compensation : stopper net l’hémorragie de la transformation des logements à l’année en meublés de tourisme de type Airbnb permanents sur la zone tendue du Pays Basque. Suite au travail de chiffrage, de plaidoyer, de notes juridiques et techniques et de mobilisation citoyenne mené par Alda pour documenter le tsunami Airbnb emportant sur son passage les logements à l’année, la CAPB a adopté le 9 juillet 2022 un règlement ambitieux à la hauteur du problème. Selon les chiffres de l’Audap en effet, entre 2016 et 2020, les locations de meublés de tourisme avaient augmenté de 130 % en 5 ans, passant d’environ 7 150 annonces actives à 16 440 en 2020, parmi lesquelles 67 % concernaient des logements disponibles plus de 4 mois dans l’année. Sans règlement de compensation, des milliers de logements supplémentaires auraient continué à être perdus chaque année pour les habitants, aggravant une situation du logement déjà catastrophique. 

Alors que plus de 9 600 autorisations de changement d’usage (autorisations permettant de transformer un logement à l’année en meublé de tourisme) ont été accordées entre le 1er janvier 2020 et le 28 février 2023, elles ont drastiquement chuté depuis l’entrée en vigueur de la mesure. En 2023, seules 2 autorisations à l’année avec compensation ont été délivrées, et 3 en 2024. Le nombre de demandes a également dégringolé, signe que les propriétaires ont préféré changer la destination de leurs biens. En 2024, 654 autorisations de location mixte (location à l’année pour des étudiants avec location saisonnière pendant la période estivale) ont été accordées, et 200 rattachées à la résidence principale. 

Alda rappelle l’importance de s’appuyer sur des indicateurs fiables pour mesurer les premiers effets de la compensation. L’association avait en effet révélé les manoeuvres de l’Union des loueurs de meublés de tourisme, l’ULMT64 qui incitait ses membres à mentir sur la destination de leurs biens suite à l’entrée en vigueur du règlement (2), pour falsifier les résultats et induire en erreur l’opinion publique et les juges. Coïncidence du calendrier, la cour administrative d’appel examinait ce jeudi 27 février le recours de l’ULMT64 et de la FNAIM visant à annuler le règlement de compensation. Signal positif : le rapporteur public a demandé le rejet de leurs requêtes, en expliquant que le règlement “répond à un objectif d’intérêt général”. La décision de la cour sera connue fin mars. 

Et ce n’est que le début ! 

Les premiers résultats positifs de la compensation sont encourageants pour cette mesure dont les effets seront pleinement mesurables sur le long terme. Une partie des personnes physiques qui détenaient une autorisation de changement d’usage délivrée avant l’entrée en vigueur du règlement le 1er mars 2023 louent encore sans compensation puisque ces autorisations ont une durée de 3 ans. Dans un an, plus personne n’échappera à la règle : ni les SARL et SCI (soumises au règlement sans délai dès le 1er mars 2023), ni les personnes physiques. 

La pleine efficacité du dispositif suppose également une lutte efficace contre la fraude. En 2023, Alda a estimé à environ 2 000 le nombre de meublés de tourisme illégaux. La mise en place d’agents assermentés en charge du contrôle par la CAPB et les communes, et les premières poursuites au tribunal (un propriétaire poursuivi par la ville de Biarritz jugé le 3 février, et au moins deux nouvelles assignations prévues d’ici le mois de mai) sont des dispositifs encourageants pour qu’aucun propriétaire ne puisse continuer de se sentir au-dessus des lois. 

Tenir la barre 

Alors que les élections municipales se profilent, des voix se mêlent à celles des lobbies pour mener un travail de sape à l’encontre du règlement de compensation. Le maire PS d’Hendaye Kotte Ecenarro et le maire Les Républicains de Saint-Jean-de-Luz Jean-François Irigoyen, tous deux comptant déjà parmi les rares détracteurs du règlement au moment du vote (le règlement de compensation a été voté à 98% des voix par les 232 élus de la CAPB), renouvellent leur cabale à coups d’arguments tronqués. Revenir sur la compensation, comme le préconisent Kotte Ecenarro et Jean-François Irigoyen, reviendrait à faire sauter le mécanisme qui protège les logements actuellement loués à l’année et accepter que chaque année, des milliers d’entre eux deviennent de nouveaux meublés de tourisme et soient perdus pour les habitants. Dans le contexte de grave crise du logement que connaît le Pays Basque et la très grande difficulté qu’ont les gens à se loger, de telles positions sont inacceptables. Il ne suffit pas non plus d’invoquer comme solution alternative la “création de plus de logements” : sans mécanisme garantissant que ceux-ci bénéficieront à la population à l’année, cela ne servirait qu’à alimenter un tonneau des Danaïdes. 

Alda appelle au contraire les municipalités et la CAPB à renforcer les contrôles permettant de lutter contre les Airbnb frauduleux pour récupérer des logements à l’année, encourage l’ensemble des municipalités à appliquer les dispositions de la récente loi Echaniz-Le Meur permettant d’étendre le règlement de compensation et à oeuvrer pour la généralisation des servitudes de résidence principale dans les Plans Locaux d’Urbanisme Intercommunaux (PLUI) à venir afin de protéger les logements à l’année. 

L’association, forte de sa cellule d’investigation qui traque fraudes et autres abus, continuera quant à elle de se mobiliser en faveur de toutes les mesures et dispositifs permettant de défendre le droit de se loger et vivre au Pays. 

1) La mesure de compensation oblige à produire, à partir de locaux non destinés à l’habitation, un nouveau logement de surface équivalente et dans la même commune pour

tout logement transformé en meublé de tourisme. Cela rend très difficile voire impossible ces transformations et protège définitivement le parc locatif à l’année.

(2) https://www.alda.eus/journal-alda-ulmt64-mensonges-en-bande-organisee/